Tant qu’on se débat – épisode 6 – Chapitres 25 à 29

Par samedi, février 23, 2019 0 No tags Permalink 0

Chapitre 25

Je déteste les vélos. Voilà ce que je me dis, sur mon Vélib trop lourd, pédalant péniblement derrière Sophie qui zigzague entre les voitures en plein Paris. Je l’aime bien Sophie, c’est une des rares de la bande que je vois toujours autant, ces derniers mois sans Adam. Peut-être parce qu’elle se fiche des connexions entre les gens, elle ne parle jamais de la vie des autres. Non ce qui intéresse Sophie c’est la richesse intérieure. C’est une extraterrestre qui se nourrit de soja et de produits étranges, de préférence bios et sans gluten et qui pense résoudre la guerre dans le monde avec une séance de méditation.  Elle double un bus par la droite, monte sur un trottoir et stoppe sa course folle en même temps que mon angoisse, devant le 4 villa Rosa.

Sophie a entrepris la lourde tâche de me ressaisir. Elle me l’a dit tel quel d’ailleurs « on va te ressaisir Léa ». Une amie normale m’aurait offert une nouvelle coupe chez Tony&Guy puis on serait allées boire du rosé dans le marais en chinant des jeans beaucoup trop chers. Mais pas Sophie. Elle préfère nettoyer ma conscience et éveiller mon cerveau reptilien. Ca aussi elle me l’a dit tel quel.  Elle pousse le portail d’un petit jardin et on entre dans une pièce remplie de coussins. On est accueillies par une femme au prénom imprononçable, qui nous fait signe de nous asseoir. Ca sent l’encens et seules de petites bougies permettent de voir autour de nous, car de lourds rideaux cachent les fenêtres. On s’installe au milieu des autres et on ferme les yeux.  Ca fait longtemps que je ne me suis pas retrouvée les yeux fermés sans le projet de m’endormir. Seule face à moi-même.

Après un insant où mon esprit semble lutter contre lui-même, apparaissent alors comme si elles n’attendaient que ça, des images que je n’ai pas envie de voir. De ma mère et de sa souffrance. La femme doit le sentir car elle nous demande de raccompagner doucement mais sûrement les pensées parasites vers la sortie.  Sa voix douce me berce, je me laisse porter. Je sens peu à peu mon visage, mes épaules, mon ventre se décontracter. Je ne soupçonnais pas toutes ces tensions.  Je respire et tout à coup je découvre que mon corps peut fonctionner autrement.

Que cette crispation dont je n’avais même pas conscience peut disparaitre. Mon souffle est régulier, j’entends celui des autres. Elle nous guide vers un souvenir, on doit choisir celui qui nous fait du bien. Sans réfléchir je nous revois ma mère et moi enfant, à la table de la cuisine de notre appartement de Montrouge. C’est une scène anodine, je ne sais pas pourquoi mon cerveau me la propose comme souvenir de bonheur. Mais je n’ai plus le temps de changer alors je me concentre sur ce moment.

Dans mon souvenir je me sens juste bien, apaisée, réconfortée. Protégée. Je distingue chaque objet, la toile cirée à carreaux rouges, le tablier de lin et les verres colorés. C’est la routine de mon enfance. Une scène qui s’est répétée tous les soirs pendant des années. Ma mère qui prépare à manger pendant que je lui raconte ma journée. La routine est le socle de l’enfance. Quand on est petit, on a besoin de se rattacher à des habitudes. A présent elles ont valsées. Pourtant je ressens exactement ce sentiment, dans mon corps, dans mon esprit. Tout est intact. On ne connaît pas sa chance, quand on est enfant. Les choses à leur place, l’amour partout sans avoir à donner en retour. On s’en rend compte lorsqu’on devient parent. On prend la place de l’accompagnateur pour céder celle de passager innocent. Pour moi, la réalité a été trop brutale. J’ai tout perdu alors même que j’étais à peine mère, que mon rôle était encore fragile. J’aimerais parfois redevenir cette petite fille à la table de la cuisine, sans soucis, sans peurs, qui discute tranquillement avec sa maman, en attendant le repas. Je sens les larmes monter, j’ai dû mal à les retenir. Mon corps détendu ne fait plus carapace, rien ne retient les sanglots qui affluent.

La séance se termine et j’ai l’impression de me réveiller d’un très long sommeil.

Mon corps est détendu mais mon esprit a été balayé par une énorme vague.  Certains ont besoin d’échanger sur ce qu’ils viennent de vivre, moi je ne peux rien dire.

Sophie me propose un thé vert dans le café au coin de la rue. Je commande un vin blanc frais, comme celui dont ma mère buvait parfois un verre quand une amie venait dîner avec nous. Ou plus tard, quand Antoine restait le soir. J’aimais bien quand il était là. Un joli verre à pied et un vin blanc glacé. Je grappillais les olives et j’essayais de m’imaginer en regardant ma mère, comment je serais plus grande, avec une jolie robe et un rire cristallin, une confiance en moi inébranlable et un beau rouge à lèvres bien rouge.  Je laisse glisser l’arôme râpeux du chardonnay sous ma langue et je ferme les yeux. On a tous en tête des images qui symbolisent l’âge adulte. Pour moi c’est celle-ci. Pour la confiance et le rire cristallin on repassera.

Chapitre 26

Ilda a les sourcils froncés, elle réfléchit, une miette sur la joue. Son gobelet va être froid.

« Quels sont les critères qui permettent de dire qu’on est heureux ? Je ne sais vraiment pas Léa. » Je lui souris. Elle est de bons conseils mais ça, elle ne sait pas. Elle tente quand même.

« Je pense qu’ils sont trop nombreux, fluctuants ces critères. Le bonheur des uns ne serait pas celui des autres. Ca dépend des jours, de l’humeur. Ce qui te rendra heureuse un jour te paraîtra insignifiant à force de répétition. Et puis il y a bonheur et bonheur. Je crois avoir vu une pyramide à ce sujet une fois, pour être heureux il faudrait déjà avoir la base avec le fait d’avoir un toit et à manger, puis après la famille, les amis et en dernier le travail, la réussite. Dans une société comme la nôtre on a tout, donc on surinvesti sans doute ce dernier point. On a envie d’un bonheur plus individualiste, de reconnaissance sociale, plus égoïste. » Je l’écoute sans que ça ne fasse écho. L’argent, la réussite, oui c’est bien, mais quand on est cassé de l’intérieur, c’est quoi la petite étincelle qui rallumera tout ça ? L’amour à profusion, la tendresse bien sûr… mais parfois après une étreinte chaleureuse on ressent un tel vide, un tel sentiment de nostalgie. Moi je veux comprendre comment atteindre le bonheur qui dure, pas seulement celui de petits instants qui passent trop vite. Celui plein, rond, rempli comme le ressent un bébé endormi qui vient de manger… est-ce qu’on peut l’avoir à nouveau ce sentiment et le faire durer ?

Est-ce possible de vibrer encore, de rire sans voile, de se sentir bien, pleinement, sans ce pincement lorsqu’on a vécu un deuil, un drame, un choc… ou serait-ce toujours un bonheur en demi-teinte, avec un arrière-goût de plus en plus léger mais toujours présent de nostalgie ?

Ca m’épuise. Cette quête qui n’aboutira jamais. J’ai démoli cette vie pour ne pas me mentir à moi-même. Parce que la mort de ma mère était trop difficile pour accepter de m’enliser dans un quotidien sans amour. Si elle avait été en vie je serais restée avec Adam, je le sais. Je n’aurais pas été assez malheureuse pour partir. J’aurais pu encaisser un quotidien sans relief si je n’avais pas eu si mal par ailleurs.

Finalement c’est la douleur qui m’a conduit à l’exigence du bonheur.  Moi qui me croyais affaiblie, je découvre que je suis si forte. Plus que je ne l’aurais cru.

Ilda me prend la main, elle a les larmes aux yeux. J’ai parlé tout haut.

« Tu sais Léa, la vie est vraiment bizarre et merdique parfois. J’ai longtemps subi les choses et je crois que le bonheur finalement, ce n’est pas vraiment ce qu’on atteint, mais l’élan de vie qui nous fait bouger pour y arriver. Tant qu’on se débat, ça veut dire que ça va. »

Alors ça va pour moi. Se débattre je connais.

Chapitre 27

Au bureau, un matin le téléphone sonne et apporte dans l’air saturé de l’agence un délicat parfum de Provence. J’aurais reconnu cet accent entre mille. Celui du Sud, mais un peu plus rocailleux, moins lisse : celui de Marseille. Des vacances de mon enfance, de ma mère, de la maison de pêcheur des Goudes, celle léguée par ma grand-mère. De mes racines.

La voix éraillée m’est familière sans pour autant que je puisse y mettre un nom dessus. Il s’agit d’un voisin que je connais de vue, un vieux loup de mer approchant la cinquantaine. Il a eu du mal à me retrouver, enfin ça y est, il a mis la main sur moi, il ne veut pas me déranger ni m’inquiéter, mais il a l’impression que la maison se fissure, il est gêné de me l’avouer mais il est rentré dans le petit jardin cueillir des herbes comestibles qui poussent au milieu des mauvaises, et s’est rendu compte de cette immense fissure, la maison menace de s’écrouler.  Rien que ça.

C’est étrange que cette maison tombe en ruine justement lorsque ma vie n’est elle aussi qu’un champ de ruines. J’ai cette horrible sensation d’aller de galère en galère, sans jamais vraiment savoir si la suivante sera plus pénible que la précédente. En temps normal j’aurais appelé Adam, il aurait réfléchi avec son cerveau de juriste surentrainé, aurait cherché quelqu’un sur place, délégué la besogne. Mais je sais que cette fois je n’y couperai pas, envoyer quelqu’un serait risquer l’arnaque, je n’ai pas gardé de contacts sur place et même si les gens ont bien connu ma mère, pour eux je ne suis sans doute qu’une parisienne. Une de celle qui ne daigne même pas revenir pour les vacances.  J’aime la région pourtant. Comment ne pas l’aimer. Les calanques, la Baie des Singes, les pieds dans l’eau froide et salée au petit matin, quand les touristes n’ont pas encore atteint le bout du monde. Ce lieu n’a pas de prix, il est beau et poétique. Il est unique. J’aurais pu y aller pour les vacances, oui. Mais rien que l’idée de revoir la maison me fait mal dans la poitrine. Y retourner sans ma mère, sans son rire, sans ses mains brunes qui découpent le poisson, qui arrosent les fleurs du petit jardin. Elle me manque tellement. Cette maison sans elle, c’est trop difficile.

Et pourtant. Je n’ai pas le choix.

Chapitre 28

Rafael a tenu à venir. Je lui avais dit que je partais pour les vacances scolaires, je profitais de la semaine où Lucas était chez son père. Il m’avait dit je viens. Sans doute devait-il s’imaginer un périple romantique, en voiture à sillonner la France de haut en bas, contraints à l’isolement dans l’habitacle de ma petite voiture à cause de ma peur de l’avion. Et aussi car le fameux bout du monde est très mal desservi. Je lui avais dit non, c’est un voyage dans le passé, un retour aux sources, je dois le faire seule. Il n’avait rien dit, avait attendu son heure tranquillement. Puis il était revenu à la charge, arguant de son utilité, il s’y connaissait en maison fissurée, il pourrait m’aider à trouver quelqu’un là-bas et puis je n’allais pas passer une semaine toute seule, c’était trop triste.  Ce dernier argument l’avait emporté. J’avais peur de mes sentiments sur place, du noir profond de la chambre, dans lequel je devrais amadouer mon cerveau morose tous les soirs. Quand on a connu une forme de folie, on se fait parfois peur à soi-même. La légèreté de Rafael était parfois précieuse. S’il insistait, pourquoi pas… ses yeux avaient sauté de joie, il avait tenté l’impassibilité, avait modestement réfréné son large sourire. J’étais touchée de voir à quel point il était heureux de passer cette semaine avec moi.

*

La route est longue. Presque 8 heures entre Paris et les Goudes. On est partis à 6 heures du matin, quand Paris dort encore. A chaque fois qu’il m’était arrivé, par obligation, de me lever aussi tôt, je prenais la résolution de le refaire une fois, en prenant le temps. C’est tellement agréable, les rues encore endormies, les terrasses de café qui s’installent, les boulangeries éclairées au milieu du noir. Il y a quelque chose de fort chez les gens qui se lèvent tôt. Dans la lueur du matin, à un feu rouge, nous croisons une femme qui me fait penser à ma mère. Cette dame a les cheveux attachés en un chignon fou, elle est fine et élancée. La même démarche. Quelque chose d’usé mais de solide.

A chaque fois que je repense à ma mère, j’ai cette envie, cette image mentale, de la prendre dans mes bras. C’est étrange, car pendant sa maladie je ne l’ai pas fait une seule fois. Nous n’étions pas proches physiquement. J’avais une certaine pudeur, qui était déjà bien ancrée avant sa maladie. Je n’en ai pas ressenti le besoin sur le moment, tout au plus lui avais-je tenu la main à l’hôpital. Comme ces gestes étaient rares, ils étaient précieux. Dans ma mémoire était ancré pour toujours ce moment où elle m’avait pris la main, posée sur sa cuisse, entre deux larmes que je versais. Elle l’avait serrée fort et avait prononcé des paroles de réconfort. Pour moi, pas pour elle. Qui peut, quelques jours avant sa mort prendre encore soin de son enfant, penser encore aux autres avant soi ? Protéger, encore et toujours. Me ménager, m’entourer. J’étais balayée par sa force mais surtout par son amour pour moi, qui faisait passer ma peine avant sa mort, ma vie avant la sienne.

A quel moment sait-on que l’on est une bonne mère ? Dans ces moments-là, sans doute. L’aurais-je été pour mon fils ? Aurais-je mis de côté ma frousse, ma douleur, pour le rassurer lui ? Je ne sais pas. Ma mère m’a offert jusqu’à la fin une protection sans faille, a mis mes besoins, mon bien-être avant le sien. Elle a été exemplaire. Et quand je pense à elle j’ai seulement envie de la prendre dans mes bras. Parfois ce pincement me prend, cette envie de revenir en arrière. Mais je sais que j’ai fait ce qu’il m’était possible, ce que j’ai senti bon de faire, au moment où il m’était donné de le faire. On se débat avec ce que l’on a. Le feu passe au vert et j’avance. La dame est loin.

Rafael veut un pain au chocolat. Il court jusqu’à une boulangerie, revient avec un sachet plein de bonbons, pour la route, me dit-il avec la même expression que si on partait à Eurodisney. Il a aussi un croissant pour moi et une canette de coca. Il mange en faisant du bruit et parle la bouche pleine. Ca ne m’étonne pas spécialement, sans m’agacer, comme lorsqu’on pardonne à un enfant d’avoir du chocolat partout sur la bouche tant on a plaisir à le voir rassasié.  Je mets France Inter et j’ai envie de ne pas parler. C’est mon rituel du matin, un café allongé avec un nuage de lait et la radio. Mon ordinateur et le calme de l’appartement. Cela fait longtemps que je n’ai pas été seule le matin. Quand ce n’est pas Lucas, c’est Rafael qui partage le petit déjeuner avec moi. Je ne sais pas comment il s’y est pris, mais il est là toutes les nuits. Rafael finit par regarder le paysage parisien, puis les champs défiler sous ses yeux. J’aime qu’il ne gâche pas le moment. Je sens que parfois il prend sur lui, qu’il se plie à mon comportement, par mimétisme. Je n’ai pas l’habitude de fréquenter des gens, des hommes qui me laissent guider la conversation, la journée. Pas que j’ai connu des caractères forts, mais c’est plutôt que je ne sois pas influente ni meneuse. L’attitude de Rafael m’embarrasse parfois. Il se fait discret, comme par peur de me brusquer. Mais j’ai parfois l’impression qu’il s’agit d’un jeu pour lui. Sa vraie nature, un peu plus brute, réapparait au détour d’une conversation, d’une nuit, et je cerne alors l’ampleur des efforts qu’il fait pour me plaire, pour ne pas me brusquer. Une fois je l’ai entendu au téléphone avec un ami, son ton était énergique, rugueux, presque violent, il parlait mal et fort. Il ne m’a jamais parlé comme ça.

Je sais que la différence d’âge doit l’impressionner. Je ne sais cependant pas pourquoi il tient tant à être avec moi. Il y a des filles plus jeunes, de dix ans de moins que moi, qui rêveraient de lui, de se taire et de le suivre. J’en viens à me dire que ce qu’il apprécie chez moi justement, c’est cette inconsciente soumission liée à nos différences, d’âge et de vie, qui lui permet de se laisser porter.

*

On parle rarement de Lucas. Une fois il m’a demandé si ça n’avait pas été trop difficile de ne plus le voir qu’une semaine sur deux. J’ai bien senti qu’il ne pouvait mesurer combien cela m’avait touchée. Il est encore l’enfant de ses parents. Je ne suis plus l’enfant de personne. Je suis la mère de quelqu’un. Mais une mère seulement présente une semaine sur deux. Il ne peut imaginer à quel point c’est douloureux. A quel point c’est culpabilisant. On imagine que les adultes ont leurs raisons, que les enfants se remettent de tout. Mais lorsque l’on est confrontée à un enfant de deux ans qui hurle, frappe et crie sa rage à travers chaque geste, chaque activité, qui refuse d’être consolé, alors on se dit qu’aucune raison ne doit être vraiment valable pour lui infliger ça. Je m’en suis voulu, moi la fille d’une mère qui a toujours su me faire passer avant elle. Je me revois petite lui demander où était mon père par envie d’être comme les autres, puis ensuite par peur, car j’avais la crainte qu’un jour il vienne me chercher, je voyais en lui un potentiel ennemi de mon quotidien. Un inconnu qui pourrait m’emporter chez lui sous prétexte de gènes communs. Elle m’avait assurée que ça n’arriverait jamais, qu’il était dans une vie installée, sans vraiment connaissance de mon existence. J’avais été soulagée. Plus tard j’avais mis en doute cette version, elle m’avait avoué ne l’avoir que peu connu, qu’il s’agissait d’une histoire de vacances. J’étais arrivée à un âge où cela n’avait plus aucune importance, ma mère m’avait élevée de façon à ce que jamais je n’ai la sensation que la place à côté d’elle était vide. Je ne ressentais pas le besoin, que beaucoup d’enfants décrivent, de retrouver un inconnu, qui n’aurait de père que les gènes. L’amour est au-delà du sang, il est dans le quotidien, dans la présence réconfortante. Je n’avais pas de père comme ça, donc je n’en voulais pas du tout.  Puisque cela impliquait forcément un père étranger, inconnu, il m’était impensable de vouloir le connaître.

A la mort de ma mère, j’ai eu une bouffée d’angoisse à l’idée de me retrouver seule, sans parent. Mais je ne veux pas courir après une chimère, tenter de trouver du réconfort dans la quête d’un géniteur qui n’existe pas. Et quelque part, par respect pour la mémoire de ma mère, son passé, ses choix de vie, je ne veux pas la trahir en cherchant un inconnu. Et justement, ce retour vers le village de son enfance, sans elle pour protéger ses secrets, me fait peur. Je ne veux pas risquer de dérouler le fil d’une intimité dont je n’ai aucune envie d’apercevoir la bobine. Sur le trajet, mon téléphone vibre, il nous sert de GPS donc le prénom s’affiche sous nos yeux : Sacha. Un instant après une alerte indique qu’il m’a laissé un message vocal.

Je sens un picotement dans les mains, dans le ventre. Cette sensation désagréable qui ressurgit dès que le passé revient. Je m’arrête sur l’aire d’autoroute suivante.  J’écoute son message, plutôt bref, m’invitant à ne pas le recontacter, pour me dire simplement qu’il avait envie de faire une pause, entre deux patients. Sa voix rauque exprime tout sauf une quelconque chaleur.  Dans les toilettes des femmes je vois dans la glace éclairée au néon blanc, mes yeux si clairs cernés, rougis, mes cheveux attachés à la va-vite, ma peau trop blanche et mes lèvres trop rouges. Je suis en colère tout à coup. De me voir ainsi.  Laide, fatiguée, terne. Qu’aurait pensé ma mère, qui m’a expressément demandé de rester heureuse, de rayonner. Elle m’a dit ça mot pour mot : « sois rayonnante. Autorise-toi le bonheur. On a qu’une vie et tu dois la vivre pleinement. Sois heureuse, sois bien dans ta vie. Là où tu dois être. » Elle penserait que j’ai tout gâché. Tout. Que j’ai lâché la rampe, lâché prise, lâché ma famille, lâché mon fils, lâché mes rêves. Et je m’apprête à lâcher la maison des Goudes.

Je suis soudain en colère contre Rafael. Pourquoi est-il là ? Qu’est-ce qui lui plait dans ce pâle reflet sans lumière ? Que me veut-il vraiment ? Je retourne à la voiture, il m’y attend, un gobelet en carton rempli de café au lait à ras bord. Il me jette un regard étonné et appuyé et me le tend sans un mot.  « Qu’est-ce que tu fais là, en fait ? ».

« Je t’accompagne, ça ne se voit pas ? »

« Non mais… tu me veux quoi, au fond ? »

Il marque une pause. Ses yeux se plissent en deux fentes noires.

« Et toi, tu me veux quoi ? ».

Je le regarde sans comprendre.

Il continue, plus doucement.

« Je ne sais pas si parfois tu veux de moi ou au contraire tu veux que je disparaisse, Léa. Si tu es avec, ou contre moi. Ca fait plusieurs semaines que je te vois tous les soirs, enfin certaines semaines. Tu es sur la défensive, tu parles peu et parfois tu t’ouvres, d’un coup, et on passe une nuit blanche à refaire le monde. Tu es lumineuse et l’instant d’après tu n’es qu’une ombre. Alors moi je sais ce que je veux, être à tes côtés, tout simplement, car surprenant ou non, ça me plaît. Tu me plais. Malgré le blues de certains soirs et le fait que parfois tu fous le cafard rien qu’en cassant tout ce que je peux dire d’une grande tirade dont tu as le secret. Parce qu’à côté de ça tu as du génie et tu sais aussi rendre la vie jolie. Enfin je crois… j’espère… Mais toi, tu veux quoi ? » Je n’ai pas de réponse.

Chapitre 29

J’aurais pu vivre là. Par un tour de passe-passe étonnant, une succession rapide, il n’y a plus que moi, cette maison me revient.

Et pas n’importe quelle maison.

La maison de mon enfance, de Callelongue, sur le chemin qui mène aux Goudes à droite, puis si on continue plus loin, à Cap Croisette, ou plutôt comme nous aimions l’appeler : le bout du monde.

Le vigile à l’entrée de Callelongue sort de la cabane, il est pourtant très tôt, il est sans doute là pour les randonneurs. Il hésite à nous laisser passer. Il ne me connait pas parmi les riverains. Et pour cause, la dernière fois, je n’étais pas la même.

Je lui dis je suis la fille d’Agathe, il ne voit toujours pas, je dis alors la maison bleue, enfin grise, un mélange, celle tout au fond de l’avenue des Pebrons, vers le départ du sentier de randonnée. Celle qui a un petit balcon à l’étage et un jardin qui se termine dans la montagne. La maison des Delorme. Il hoche soudain la tête et lève la barrière, non sans jeter un coup d’oeil appuyé à ma plaque d’immatriculation.

Rafael à côté de moi ne dit rien. Un autre jour se lève ici, mais l’ambiance est complètement différente de celle que nous avons observée à Paris. Je sais l’effet que ça peut lui faire, tant je le ressens à chaque fois. Les paysages ici sont grandioses par leur beauté mais surtout par leur simplicité. Un minuscule port de pêche, la montagne, la végétation et la pierre omniprésente juste au-dessus de nos têtes, l’étendue d’un bleu limpide dans lequel nous avons été plongés en empruntant l’unique route qui nous mène ici. Un écriteau tente de réfréner les ardeurs des vacanciers « sortie difficile sur le retour des Goudes », indiqué à l’entrée de la Pointe Rouge. Mais il n’en est rien hors saison, même si les Goudes comme Callelongue connaissent leur lot de randonneurs passionnés tout au long de l’année.

Ce matin d’avril nous sommes seuls au monde, et la vision de ce paysage qui s’éveille au jour est unique. On peine à croire qu’on est encore dans le 8ème arrondissement de Marseille, tant les maisons de pêcheurs paraissent d’un autre temps. Malgré le côté pittoresque de ce quartier, l’usure et la pauvreté émaillent les rues. Tout semble difficilement entretenu, les filets de pêche raccommodés plus d’une fois, les volets affichent des peintures écaillées. Mais on sent dans cette rue l’amour des habitants pour leurs maisons : des guirlandes de guinguette sur les minuscules terrasses, les pots de fleurs de toutes les couleurs, les petites affichettes à l’entrée de chacune aux jeux de mots que je trouve toujours désuets.  Nous sommes à un endroit où il fait bon vivre.

En arrivant devant le jardin, je comprends mieux l’appel que j’ai reçu. La maison de ma grand-mère est totalement laissée à l’abandon et détonne avec la douceur du quartier. Elle n’est pourtant pas la seule, on voit bien qu’une ou deux ne sont pas habitées, il y a même des pancartes de rénovation et travaux en cours sur certaines. Mais la mienne affiche une hostilité toute personnelle. Des volets fermés, une porte barrée d’une planche, un mur lézardé de toute part et des ronces en guise de jardin. Si elle pouvait parler elle dirait simplement « dégagez ».

Le trousseau de clés est lui aussi d’époque, une grande clé en métal comme celle des contes d’autrefois, fait office de seul rempart entre la maison et le monde extérieur. J’ouvre au son rouillé de la serrure.

Ca sent le moisi. Tout à coup je me demande ce qui m’a pris de l’emmener ici.

« Je pourrais vivre là », je dis tout haut.

Rafael ne bouge pas. Il ne prend pas la peine de me dire qu’il semble impossible de vivre dans cette ruine.

Je reprends, comme pour m’en convaincre : « je pourrais vivre là. C’est ma maison. » Il me fait face et je crois un instant qu’il va me dire de ne pas le quitter. Mais il me demande « et Lucas ? ». Et ça m’agace cette façon de me ramener à mes responsabilités.

« Quand je dis « je », j’inclus toujours Lucas. Il n’y a pas besoin de nous pour lui ».

« Et son père ? »

Il ne dit jamais Adam, ni ton ex. Non il dit toujours le père de Lucas. Comme si c’était le seul lien que nous avions, un lien qu’il ne comprend pas mais qu’il pense suffisamment important. Un lien qui lui suscite de l’empathie, mais une de celle que l’on ressent face à quelque chose que l’on ne connait pas vraiment, mais dont on a tellement entendu parler. Le lien de deux parents entre eux.  Deux parents qui ne s’aiment plus mais qui ont un enfant ensemble.  Je n’ai jamais compris ce que c’était que de ne plus s’aimer. Je ne l’ai jamais compris et pourtant je l’ai vécu. Mais c’est tellement étrange de mettre au monde un enfant en tenant la main de quelqu’un, de vivre l’amour fort, puissant et un jour de se dire que tout cela a compté, à un moment donné, mais que maintenant il reste simplement les souvenirs de ça, mais plus la sensation. Il y a eu une époque, où je ne pouvais pas m’endormir sans tenir Adam dans mes bras, sans sentir son odeur, le piquant de sa barbe. Et un jour, sans raison particulière, je me suis aperçue que nous nous tournions le dos dans le lit. Ca a commencé par des disputes qui nous faisaient dormir chacun de notre côté. Puis, nous nous endormions sans nous toucher. C’était une sensation désagréable au départ mais contre laquelle je n’ai pas lutté. Elle a donc fini par devenir banale. Comme une évidence, quelque chose d’étranger à nous, qui s’impose sans que l’on n’y puisse rien. Je pense tout simplement qu’on ne peut plus avoir de proximité physique avec quelqu’un contre lequel on est en guerre perpétuelle. La fatigue, la peine, les nuits blanches se sont invitées dans ma vie et ont tout détruit. Pendant un an et demi je me suis réveillée en sursaut toutes les nuits, le souffle coupé en pensant « ma mère va mourir ». Comme si je prenais à chaque fois conscience de l’annonce, de la réalité. La peur de la mort est un puissant tueur de tendresse, un abîme dans lequel on entre seul et qui fait table rase autour de soi. Je m’asseyais sur le canapé la nuit, des heures durant, je retouchais des photos, j’écrivais mes sensations sur le blog, sans parvenir à me soulager de mon angoisse et de ma peine. Sans parvenir à parler à l’homme qui partageait ma vie. Adam m’a dit plus d’une fois, va voir un psy, fais quelque chose. Je ne comprenais pas cette phrase, cette facilité à me trouver une belle et brillante solution, à se dédouaner du problème. Ne comprenait-il pas que je n’avais pas besoin de solution justement? Qu’il n’y en avait pas ? Que je ne pouvais que ressentir cette peine et me laisser submerger par la vague, que je n’avais pas d’autre choix que de me laisser avaler toute entière ? Voir ma mère souffrir, avoir peur, en passer par toutes les étapes de la maladie, être près d’elle mais me sentir tellement impuissante, ne pas savoir comment changer la donne, comment l’aider. La seule chose que j’avais pu faire pour elle, c’était de maintenir nos relations telles qu’elles avaient toujours été. Je lui devais cette sincérité, cette honnêteté. Je ne voulais pas rentrer dans une relation policée, aux discours aseptisés, ternis par l’angoisse, la peur. On riait encore, on s’accrochait encore, moins fort bien sûr, mais je lui devais encore ces débats, nos discussions enflammées. Sinon qu’aurions-nous été, à part un semblant de nous ? Nous étions restées pendant un an et demi les mêmes, mère et fille. Et elle était restée pour Lucas cette grand-mère, qui n’en fait pas trop, qui n’agit pas comme si ses jours étaient comptés. Jusqu’à ce que la douleur, la fatigue l’emportent et qu’elle devienne pendant plusieurs semaines une enfant en souffrance, son cerveau lui imposant une fin de vie à sa façon, lui enlevant la notion de temps, de réalité, lui imposant ses visions, ses hallucinations. Elle souffrait beaucoup. Enormément. Elle perdait sa lumière dans une lente agonie.

Rien ne pouvait me sortir de là. Rien. Adam n’y parvint pas. Je restais péniblement hors de l’eau à cause de Lucas, je ne pouvais dire grâce à, tant c’était difficile de m’occuper de lui, de subir ses crises d’enfant, de me lever la nuit, d’être patiente. J’hurlais en permanence, je sentais que je risquais de lui faire du mal plus d’une fois. Il avait tant de peine et j’étais devenue son bourreau. Il tentait d’attirer mon attention en permanence, mais pas de la bonne manière, en me frappant, en hurlant à la moindre contrariété. Je le haïssais de me faire subir ça lors d’un moment les plus douloureux de ma vie. Tous s’accordaient à dire qu’un enfant permet de garder la tête hors de l’eau, ils avaient raison bien sûr. Mais ne voyaient-ils pas, au bout du compte, que même si la descente était plus lente, j’étais tout simplement en train de couler ? Lucas a absorbé un nombre incalculable de larmes, de colères.  Garder à l’intérieur, la peine. En toile de fond, la culpabilité. Pour mon couple, pour mon rôle de mère. A cette époque l’indispensable était de ne pas rater mon rôle de fille. Je crois que c’est celui que j’ai réussi à interpréter le mieux. Ce rôle avait l’urgence de la mort, des dernières fois que l’on ne pourra jamais rejouer…  Dans la maison des Goudes je sens les larmes monter. Rafael croit sans doute que je pleure Adam. Mais j’ai cessé depuis longtemps de pleurer sur cet échec.  C’est triste la fin d’une relation, mais ça ne peut pas être plus douloureux que la perte d’une mère. Sans doute sa mort m’a anesthésiée. Elle me permet aussi de me reconnecter avec l’essentiel, avec ce qui est vraiment important.  Ma mère et moi avions été très fusionnelles dans mon enfance. Avions-nous coupé le cordon au moment de la maladie ?

Sans doute. On aurait pu croire que la naissance d’un enfant le permet. Que lorsqu’on coupe un vrai cordon d’avec un petit être, on coupe celui symbolique d’avec sa mère. Il n’en était rien. C’était plus complexe que ça. Le fait que nous ayons été deux tout le temps. Elle était mon seul référent. Elle était la base de ma vie. Le narrateur unique de mes souvenirs. Pourtant, on ne se voyait pas de manière régulière, luxe de ceux qui savent qu’ils vont se retrouver quand ils le souhaiteront. La naissance de Lucas avait un peu changé la donne, sans pour autant la rendre omniprésente dans ma vie. Il parait qu’on peut partir et être indépendant si l’on a reçu suffisamment d’amour. Seuls ceux qui attendent en vain l’amour de leurs parents ne parviennent pas à se détacher d’eux. La maladie m’a ramenée plus souvent auprès d’elle. Ce n’était pas forcé. C’était juste le seul endroit où j’avais besoin d’être.

J’essaye tant bien que mal à présent, de me retrouver dans ma vie. De me refaire une place, de me sentir en accord avec moi-même. Mais je ne me sens bien nulle part.

Je me tourne vers Rafael qui reste silencieux.

« Je pleure parce que j’ai tellement aimé cet endroit. On y est tellement loin de tout. C’est apaisant. » Je ne lui dis pas qu’ici, tout à coup, après une si longue absence, j’ai la sensation de pouvoir reprendre les rênes de ma vie. Sans doute ne comprendrait-il pas.  Il murmure cependant « oui, ici c’est juste l’essentiel. Rien d’autre ». Pense-t-il aux murs vides qui s’effritent doucement, à la table en formica ou à la bassine en fonte devant la petite chaise de paille, celle qui servait aux bains de pieds de mon grand-père et qui semble l’attendre d’un instant à l’autre ?  J’aime la douceur de Rafael. Sa lucidité sur la vie, lui qui vit pourtant dans un autre monde. Il me prend la main, me tire doucement vers lui. Il m’embrasse les cheveux, c’est agréable qu’il soit grand. J’aime me sentir petite à ses côtés.

*

On marche longtemps. Jusqu’au bout de Cap croisette. Nous avons besoin de nous dégourdir les jambes et de ne plus parler après ce long voyage dans la voiture. Le vent fort ici nous libère de cette convenance. Le paysage est désertique, nous escaladons les roches les unes après les autres. Tout au bout il y a un restaurant qui s’appelle la Baie des Singes. C’est étonnant mais à cette heure matinale il est ouvert. En arrivant, le patron, très jeune nous accueille en souriant, pas surpris le moins du monde d’avoir des visiteurs. Il réceptionne le poisson frais, qu’une petite embarcation amarrée sur la plage est venue lui déposer.

« Un café messieurs-dames ? » la voix est chantante, l’accent prononcé.  Le café est fort et puissant, il me fait un bien fou. La vision de cette eau sombre qui s’éclaire avec le soleil du matin est sublime. Pour la deuxième fois de la journée j’ai les larmes aux yeux. Deux randonneurs passent près de nous, avec des bâtons de marche. Ma mère aimait tellement marcher dans les sentiers, seule puis par la suite avec Antoine, qui partageait cette passion. Comment ne pas aimer ça, ici.

La petite embarcation repart sur la mer. Je retiens mon souffle. Le patron voit mon regard et me dit dans un clin d’oeil, ne vous inquiétez pas, c’est un vieux loup de mer il sait ce qu’il fait. La coquille de noix devient de plus en plus petite, je ne la perds pas du regard, jusqu’à ce que mon café devienne froid.  Tu ne finis pas, me dit Rafael. Ce n’est pas une question, un simple constat. Il a gardé le silence sans perturber le cours de mes pensées. Comme mû par un réflexe poli, il termine la gorgée froide de ma tasse. La plus amère. Il grimace et me sourit. Ce jeune homme, inconnu il y a deux mois, aux antipodes de ma vie d’avant, me connait tout à coup bien. Peut-être même mieux que certains de mes proches.

La maison des Goudes nous rapproche. Le lieu est fait pour, tout est si petit ici.  Mais ce n’est pas que ça. Je goute à des instants doux, sans conflit. Je redécouvre la joie simple de passer du temps avec quelqu’un sans heurts. Rafael est quelqu’un de calme, de doux et plein de tendresse. Il me fait parfois l’effet d’être un enfant en manque d’affection, qui essaie de se faire oublier pour ne pas s’attirer les foudres des adultes. Je découvre lors de notre périple que c’est aussi un rêveur, un contemplatif. C’est une qualité inestimable pour un compagnon de voyage. Il sait respecter les silences et apprécier le panorama. Je sais que beaucoup parlent de l’amour au singulier. Moi j’ai pour Rafael à ce moment précis, au bout du monde marseillais, un amour un peu indéfini, un peu opportuniste de l’instant. Ce n’est pas l’amour tel qu’on l’entend – le vivrais-je à nouveau un jour – mais un sentiment doux, impalpable. Le bonheur simple d’être en bonne compagnie.

Je prends beaucoup de photos. Sans la présence de Lucas, j’ai la possibilité de prendre mon temps, de cadrer, d’imaginer un peu plus avant d’appuyer sur le bouton. Qu’il est difficile de prendre les enfants en photo, toujours en mouvement, tellement instables. Et pourtant, lorsqu’on réussit il s’agit des plus belles photos. La lumière sur les petits visages, les cheveux indomptables, les sourires jamais forcés. Rafael est un beau modèle aussi, surtout en noir et blanc comme tous les bruns aux yeux noirs. Son immobilité est un atout précieux et le relief de son visage permet des contrastes troublants. Parfois l’expression sourde, le voile discret dans ses yeux me fait penser à Sacha, en moins sombre, en plus ouvert. Comme si tous les hommes de ma vie se retrouvaient sur un terrain commun.

Les hommes de ma vie. Il y en a, il y en aura. Même si l’un d’entre eux manquera à jamais à la description. Celui qui doit sans doute avoir mon nez, long et fin et mes yeux. Ces yeux bleus que je ne tiens pas de ma mère.

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